Lettre d'Information Synphonat
Numéro 7 - Avril 2011

Bonjour,

Des cimes des immeubles des agglomérations nordiques aux fonds des océans tropicaux, ce mois-ci, nous avons retenu quelques sujets d'actualité qui ont titillé nos sensibilités vertes.

Des impacts de nos activités sur les écosystèmes aux façons de repenser nos cités pour réduire ces détériorations, nous prenons graduellement conscience des progrès possibles pour concilier évolution de nos sociétés et préservation de notre environnement.

Et, au final, il n'est pas si étonnant que ce soit souvent de cette nature même que s'inspirent les innovations susceptibles de faire émerger des modèles de développement plus durables.

A notre petit niveau, partager ces quelques informations avec vous est déjà un pas sur cette voie.


L'équipe Synphonat




1. L'urbanisme durable pour changer la ville

par Fabien, Responsable du site de Villemur-sur-Tarn

Depuis une décennie des projets urbanistiques durables voient le jour en Europe ; les villes d'Europe du Nord offrent les premiers exemples de cet urbanisme où prédominent les préoccupations environnementales, les performances écologiques, et des exigences sociales telles que la mixité.

L'urbanisme durable intègre 4 notions majeures qui préfigurent une autre manière de concevoir et de construire la ville :

  1. 1- Le renouvellement urbain
  2. 2- La mixité fonctionnelle
  3. 3- Le respect de la biodiversité et des paysages
  4. 4- L'éco-construction

1- Le renouvellement urbain

L'urbanisme durable vise la reconquête économique et sociale du bâti ancien, par quartier en favorisant le caractère évolutif de la ville et la réutilisation permanente des lieux et tissus urbains ; les friches industrielles sont une cible privilégiée pour mettre en oeuvre une politique d'urbanisme durable. Un second objectif est de ramener les habitants au centre de la ville, ce centre n'étant pas forcément unique.
Le projet de remise à niveau de l'incinérateur de Copenhague est à ce titre plus qu'original. D'un bâtiment obsolète et mal perçu, l'agence BIG, qui a remporté le concours lancé par la ville de Copenhague, a imaginé faire un lieu récréatif et roboratif : une piste de ski. Un des objectifs secondaire du projet est aussi de sensibiliser les skieurs danois aux pollutions engendrées par les déchets ménagers et leur retraitement.

2- La mixité fonctionnelle

Cette notion s'articule à la précédente en tendant à limiter l'étalement urbain par la construction de quartiers denses. Les urbanistes considèrent l'espace comme une ressource rare et donc conduisent des politiques visant à l'économiser. La densité gagnée grâce à l'usage plus intensif de l'espace urbain permet de limiter les besoins de mobilité en réduisant notamment l'usage de l'automobile ainsi que la consommation énergétique de la ville.
Un panachage de logement et d'activité économique est systématiquement effectué au sein d'un même immeuble. Le but est de couvrir les besoins de la vie quotidienne, et d'intégrer la fonction récréative au sein ou à proximité immédiate du quartier dans l'idée d'améliorer la qualité de vie et d'endiguer la mobilité.
La mixité fonctionnelle est au coeur du projet BedZED dans la banlieue de Londres. BedZED ou Beddington Zero Energy (fossil) Development est un petit quartier résidentiel de 82 logements pour 250 habitants construit sur une ancienne houillère. Le projet couvre 1,7 hectares et comprend 2500 m² de bureaux et de commerces, un espace communautaire, une salle de spectacles, des espaces verts publics et privés, un centre médicosocial, un complexe sportif, une crèche, un café et un restaurant ainsi qu'une unité de cogénération (production d'électricité et de chaleur). Loin d'être réservé a une élite, BedZED affiche une forte mixité sociale avec plus de la moitié des logements réservée à des familles à revenus modestes.

3- Le respect de la biodiversité et des paysages

La compacité désormais de mise dans les projets urbanistiques peut rendre la vie quotidienne difficile. Afin de rendre cette densité acceptable, réinventer un rapport de proximité à la nature devient une priorité des urbanistes. Les Danois (encore eux !!) sont à la pointe, avec la très belle réalisation de Mountain Dwellings à Copenhague.
Ici, les concepteurs jouant sur la configuration des lieux (la légère pente du site) ont préféré intégrer parking et habitations plutôt que traiter les deux éléments séparément. Le parti a été pris de se servir des parkings pour tirer profit de la pente et ainsi pouvoir proposer une terrasse orientée vers le sud à tous les propriétaires. Chaque appartement peut donc profiter au maximum du soleil et de la vue, tout en se fondant dans le paysage.

4- L'éco-construction

La normalisation architecturale ("style international") cède la place à un souci d'adaptation aux milieux et de mise en valeur des potentiels locaux.
Avant tout, un quartier durable pourrait être apparenté, à un quartier basse-consommation ou à basse émission. Une recherche d'autonomie énergétique est en partie engagée, qui développe les potentiels des énergies renouvelables et de l'isolation thermique des bâtiments. A titre d'exemple, le projet BedZED s'est donné les objectifs suivants :

  • - Un bilan-carbone de zéro (impact neutre) sans utilisation d'énergies fossiles
  • - Consommation d'énergie réduite de 60% par rapport à la demande domestique moyenne
  • - Réduction de 50% de la consommation énergétique liée aux transports
  • - Réduction de la demande en chauffage de 90%

Les démarches d'éco-construction se sont d'abord développées aux Pay-Bas, en Allemagne, en Suède, et se diffusent aujourd'hui en Europe. Les critères écologiques, qu'ils soient paysagers ou culturels, sont le trait marquant d'une architecture durable.
Dans certains projets, le revêtement mural, décollé des murs, permet une ventilation naturelle permanente ou encore la fine résille de béton haute performance qui enserre le volume central permet de limiter les variations de température en le protégeant du soleil et des vents dominants. C'est souvent l'usage des énergies naturelles, notamment l'air qui permet de réguler le chauffage, le refroidissement, l'hygrométrie selon la fonction de chaque bâtiment.

Ce qui jusqu'ici était encore de l'ordre de l'expérimentation a fait ses preuves, et les projets "durables" que ce soit au Royaume-uni (bedZED), en Finlande (Viikki), au Danemark (Copenhague), en Allemagne (Hamburger HafenCity, ou le quartier Vauban à Freiburg), en Lettonie (Riga port city), fleurissent.

On assiste donc à l'émergence d'un véritable courant urbanistique en Europe mais aussi aux Etats-unis (New Urbanism), qui veut repenser la ville et la vie citadine.
Il est frappant de constater que contrairement aux idées reçues la "contrainte" de la durabilité loin de conduire à une régression, est source de créativité et de développement : l'ingéniosité des solutions techniques mises en oeuvre ou l'audace des projets architecturaux le démontrent.
On peut se prendre à espérer que l'urbanisme durable et la naissance à grande échelle de projets, soient les premiers pas vers un changement de modèle de développement.

Références :


2. Le stress envahit les massifs coraliens

par Arnaud, Responsable Informatique

Les rejets croissants de CO2 ne perturbent pas seulement le climat, ils ont aussi un impact sur les océans.
En cause, l'acidification de l'eau + 30% en 250 ans, avec une très nette accélération ces trente dernières années. Autrement dit une diminution du pH liée à une augmentation constante du dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère.

Malheureusement le changement climatique n'est pas le seul ennemi du corail.
Aujourd'hui, on estime que 20 à 25% des massifs coralliens sont irrémédiablement détruits et 40 à 50% se trouvent dans une situation critique.

Serge Planes, biologiste au CNRS insiste : "il y a dans la nature une capacité permanente à s'adapter à un environnement changeant. Si les différents stress qui affectent les récifs ne les tuent pas, ceux-ci peuvent effectivement devenir plus réactifs, mais ne nous berçons pas d'illusions. Il n'est malheureusement pas rare que les coraux malades ne s'en remettent jamais et disparaissent définitivement."
On sait par ailleurs que l'action anthropique locale(lié au développement côtier, à l'urbanisation, au développement de l'aquaculture, à la sédimentation...) est la cause première de cette destruction. Si l'on ajoute à cette pression le réchauffement des eaux ou encore des événements climatiques extrêmes (courant El Niño), alors les coraux ont peu de chance d'en réchapper.

Aussi, et comme la Thaïlande et la Malaisie font partie des six pays du triangle de corail, zone qui concentre 53% des récifs coralliens du monde, 75% des espèces de coraux et plus de 3000 espèces de poissons, ces deux pays ont pris le taureau par les cornes, le plongeur par les bouteilles et ont bel et bien décidé de fermer pour plusieurs mois des sites de plongée autour de certaines de leurs îles tropicales touristiques pour cause de surmenage des coraux. Une pathologie qu'on diagnostique très facilement à cause du blanchiment de ces cnidaires.
Selon un expert malaisien, 60 à 90% du corail ont été endommagés dans certaines zones.
Lorsqu'un massif corallien est abîmé, il lui faut dix, douze, voire quinze ans pour se reconstituer. Et encore, pas dans sa totalité. Mais s'il subit entre-temps d'autres attaques, le cumul de ces agressions peut lui être fatal.
La solution à tout ça : du calme et du repos...
Une denrée rare, si on considère les 500000 touristes par an, plongeurs compris, qu'attirent les récifs malaisiens.
Les barrières de corail jouent un rôle essentiel de protection des écosystèmes et des côtes en les mettant notamment à l'abri de la houle et des vagues.

Mais cela suffira t il ? Le WWF mettait en garde contre le risque de perdre la totalité des récifs coraliens du triangle de corail d'ici la fin du siècle, si on ne prend pas de mesure contre le réchauffement climatique.
Sans oublier que dernièrement la centrale de Fukushima a déversé 11500 tonnes d'eau radioactive à la mer...

Références :


3. De la chlorophylle au silicium

par Frédéric, Responsable Marketing Multicanal

Fin mars 2011, une étape significative a été franchie dans la quête d'une source d'énergie à la fois respectueuse de l'environnement, techniquement envisageable à grande échelle et économiquement réaliste.

Pour cela, une équipe de scientifiques dirigée par Daniel Nocera, professeur de chimie au Massachussets Institute of Technology, a répliqué un processus naturel à l'oeuvre depuis plus de 3 milliards d'années pour concevoir ce que ce chercheur qualifie simplement de "feuille artificielle".

Ces travaux reposent sur l'imitation du mécanisme de photosynthèse, par lequel les végétaux transforment la combinaison eau + soleil en énergie. Si ce concept est à l'étude dans plusieurs laboratoires de par le monde depuis plus de 10 ans, la rupture apportée aujourd'hui réside dans la découverte de catalyseurs extrêmement commmuns et peu onéreux.
Issus du cobalt et du nickel, ces matériaux sont susceptibles de déclencher la réaction d'électrolyse (séparation de l'hydrogène et de l'oxygène) dans des conditions d'exploitation très peu contraignantes et de façon stable. Ils complètent la "feuille" à proprement parler : une cellule solaire de la taille d'une carte à jouer constituée de silicium et de quelques composants électroniques.
La mise en oeuvre de ce dispositif est élémentaire : placé dans quelques litres d'eau bien exposés à la lumière solaire, il dégage d'ores et déjà suffisamment d'énergie pour satisfaire les besoins quotidiens en électricité d'une maison dans un pays en voie de développement. Et l'auteur de cette trouvaille pense que son rendement pourrait encore être considérablement amélioré.

Pour parvenir à une application similaire sous nos latitudes, quelques obstacles majeurs demeurent pour l'instant.
En premier lieu, le système de capture de l'hydrogène ainsi généré reste à mettre au point.
Eric Mazur, professeur de physique à Harvard souligne en outre la nécessité de réfléchir aux modalités de stockage de ce gaz hautement inflammable. Dans les économies développées, la consommation d'énergie d'un foyer typique est telle que les habitations utilisant cette énergie devraient, en l'état actuel du procédé, être équipés de conteneurs de dimension aussi importante que les bâtiments eux-mêmes.
Enfin, nos économies sont fortement orientées en fonction des infrastructures énergétiques existantes et les faire progresser vers ce type de source alternative ne se ferait pas du jour au lendemain. Cette difficulté serait moins prégnante, par exemple, en Inde, en Chine rurale, ou dans certaines zones d'Afrique où la feuille artificielle pourrait rapidement apporter une solution, en l'absence de réseaux de distribution filaire d'électricité.

Il se pourrait donc que ce soit en nous inspirant de la nature, et non en nous livrant à une surenchère technologique, que nous parvenions à résoudre l'une des problématiques majeures nées de l'avénement de notre société de consommation, la dépendance aux énergies fossiles.

Références :

Crédits photographiques : Fabrice Lejoyeux, Wildxplorer, James Fairbairn, Josep Ma. Rosell

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