Les Massaï[1], du fait de leur activité pastorale des hauts plateaux kenyans ou de Tanzanie font partie de ces populations qui, de par leur mode de vie traditionnel, s’exposent généreusement à un soleil apportant des UVB toute l’année. Leur peau est de type VI (sur l’échelle des phototypes de I à VI), ce qui leur permet d’être protégés des méfaits du rayonnement solaire équatorial . Pour autant leur taux sanguin de vitamine D se situe autour de 45ng/ml avec des variations allant de 25 à 75 pour une norme >30ng/ml. L’homme venant d’Afrique, ces valeurs peuvent ainsi être considérées comme le résultat d’une adaptation évolutive optimale et à ce titre être prises comme référence.

A sa sortie d’Afrique l’homme a parfois rejoint des contrées lointaines allant jusqu’aux pôles. Mais encore une fois, l’adaptation de l’homme a permis à des populations comme les Komis du nord de la Russie, éleveurs de Rennes, donc largement à l’extérieur, de compenser le faible taux d’UVB nécessaire à la synthèse de vitamine D par une alimentation qui en est riche: gibiers, graisse de rennes et poissons[2].

poissons gras

Ces observations nous apprennent que la double source de vitamine D (solaire et alimentaire) permet de s’adapter en fonction de de la latitude à laquelle on vit. Dans un mode de vie traditionnel, plus on est proche de l’équateur, plus la synthèse cutanée de vitamine D est conséquente, plus on s’approche des pôles, plus l’alimentation doit venir compléter une synthèse endogène alors insuffisante.

Cependant, dans nos population européennes, qui se trouvent à mi-chemin entre l’équateur et les pôles, les modes de vie modernes ne respectent aucun des deux modes adaptatifs. La vie se passe très majoritairement à l’intérieur, l’habillement est couvrant, il existe une saison hivernale à faible irradiation UVB et les aliments riches en vitamine D sont irrégulièrement consommés. L’apport moyen chez un adulte selon l’étude INCA2 est ainsi, en moyenne chez un adulte, de 100UI/j alors qu’il devrait être de 800UI/j !

 exposition soleil

D’après Arnaud Fiocret

http://www.observation-et-imagerie.fr/technique/astronomie/html/trajectoires_du_soleil.html

VITAMINE D ET INFECTIONS RESPIRATOIRES

Nous connaissons les bienfaits de la vitamine D sur l’os mais savez-vous que l’ensemble des tissus de l’organisme sait utiliser cette vitamine ? Les vaisseaux, la peau, les muscles, le foie, le rein et toutes les cellules du système immunitaire. Nous y voilà !

On sait depuis le XIXème siècle que l’exposition au soleil améliore l‘état des patients atteints de tuberculose. De nombreuses études ont montré le lien entre déficience en vitamine D et augmentation du risque d’infections ORL ainsi qu’une évolution plus défavorable des infections chroniques[3]. La grippe s’installe lorsque les taux en vitamine D sont au plus bas, en janvier-février.

La vitamine D aurait un rôle de modulation de l’immunité, en stimulant la défense d’une part et en freinant l’inflammation d’autre part. Ainsi, la vitamine D va induire la production de substances appelées « peptides antimicrobiens »  que l’on peut considérer comme des antibiotiques naturels,  qui vont contribuer à détruire l’agent infectieux. Dans les études d’intervention, la supplémentation réduit, en effet, le risque de grippe, d’otites et des infections respiratoires[4].

Alors qu’en est-il pour le COVID ?

L’infection au SARS-COV-2 est une infection respiratoire aiguë qui s’est développée dans l’hémisphère nord en hiver alors qu’elle était faible dans l’hémisphère sud en fin d’été. Des études réalisées dans plusieurs pays ont montré que plus le taux de vitamine D est bas plus la mortalité par le COVID est élevée. Des taux de vitamine D plus bas ont été trouvés chez les patients infectés par le SARS-COV-2 par rapport à des sujets négatifs et chez des patients hospitalisés en soins intensifs par rapport aux autres3. Dans une étude espagnole, la supplémentation par de la vitamine D active a montré un moindre transfert en soins intensifs des patients atteints d’une forme sévère chez ceux traités par vitamine D comparés aux patients non traités. (2% vs 50%)[5].

Maintenir un taux correct de vitamine D dans ce contexte parait donc incontournable mais comment, lorsque l’on est confiné ?

COMMENT FAIRE MONTER SON TAUX DE VITAMINE D EN PERIODE DE CONFINEMENT?

Exposition : Entre l’entrée dans la période hivernale et le confinement, il va être difficile de s’exposer à la lumière du soleil pour faire monter son taux de vitamine D. Oublions ici,  mais retenons que c’est le meilleur moyen et le plus efficace!

exposition soleil

Alimentation : les sources alimentaires de vitamine D sont dispersées et irrégulières. Elle est essentiellement présente dans les produits animaux (D3). Dans le monde végétal (D2), seuls les champignons séchés au soleil ont une teneur significative. Ainsi pour avoir 800µg de vitamine D par jour, il faut :

-        40g de foie de morue (délicieux en toast !)

-        100g de saumon, thon ou hareng sauvage (2 fois plus s’il est d’élevage)

-        2 boites de sardines de 100g

-        200g d’huîtres

-        100g de Shiitake

D’autres aliments en contiennent mais en quantités insuffisantes pour couvrir les besoins journaliers. Il faudra donc les combiner : autres poissons (truite, sole, brochet…), jaune d’œufs, foie de veau, laitages.

Si on peut inciter à la consommation de ces aliments, les études montrent que l’alimentation reste très insuffisante pour couvrir nos besoins depuis que nos vies sont concentrées à l’intérieur des bâtiments. Une supplémentation s’avère donc très souvent nécessaire, au moins en hiver et encore plus en période de confinement !

Supplémentation : la meilleure supplémentation est celle qui reproduit la physiologie naturelle, à savoir une prise quotidienne. En effet, des études ont montré que la supplémentation mensuelle à forte dose peut être contre-productive voire délétère[6]. A très forte doses, ont été observées des augmentations des fractures osseuses et des chutes ainsi qu’une augmentation de la résorption osseuse (dégradation). L’explication tiendrait dans les mécanismes régulateurs de l’organisme qui va chercher à contrôler cet apport brutal et excessif en augmentant la dégradation de la vitamine D. A moyen terme, on favorise ainsi ce que l’on souhaitait éviter !

Les recommandations de vitamine D3 sont de 800 à 1200UI par jour et ce quel que soit l’âge.

A noter, enfin, selon une étude toute récente que la supplémentation en magnésium améliore le statut en vitamine D des sujets déficitaires[7] tandis que l’association au calcium médicamenteux (>500mg) est délétère (augmentation du risque cardiovasculaire - athérosclérose).

En conclusion, le confinement a un impact variable sur la synthèse de vitamine D en fonction de la saison : impact important en été, moindre en hiver (jours plus courts et soleil rasant), intermédiaire au printemps et à l’automne. Mais soyons vigilant, la réduction des sorties extérieures a d’autres conséquences. En effet, la lumière est antidépressive, le mouvement est indispensable au maintien de la santé physique et mentale. Quant au lien social, il ne se crée pas en monologue même avec le meilleur des chats, qui lui est libre de se pavaner au soleil ! Alors pendant votre heure autorisée de sortie, faites comme lui tout en marchant. Et en rentrant chez vous, offrez-vous un apéro skype avec des amis ou de la famille !

chat soleil



[1] Luxwolda M.F. and al. (2012) Br J Nutr . 2012 Nov 14;108(9):1557-61.

[2] Laurent Panes INIST-CNRS 06/02/2015 https://recherchespolaires.inist.fr/?Statut-en-vitamine-D-et-mode-de

[3] Naima Taqarorta, Smail Chadli (2020) Nutrition clinique et métabolisme 34 (2020) 211–215

[4] Souberbielle J-C. Actualités sur la vitamine D. Cah. Nutr.Diet. 2013 ;48 :63-74

[5] E. Castillo et coll. (2020) “The Journal of Steroid Biochemistry and Molecular Biology 203 (octobre): 105751.

[6]   JC. Souberbielle (2019) Revue du Rhumatisme Volume 86, Issue 5, October 2019, Pages 448-452

[7] Qi Dai and al. (2018) Am J Clin Nutr 2018;108:1249–1258.